Résumé |
Si l’arène primordiale de la musique contemporaine est le concert et si son instant décisif est la création (ou Première audition), alors il n’est pas surprenant que soit fréquemment invoqué – au moins comme idée régulatrice – le modèle d’une écoute totale, absolument attentive et non réitérable. Mais tout musicien, de l’auditeur occasionnel au compositeur ou à l’interprète professionnel, sait que les situations dans lesquelles nous accédons aux œuvres sont multiples : les conditions sociales et techniques de l’écoute sont aussi variables que le sont par ailleurs nos raisons et nos manières d’être présents à la musique. Cela signifie que l’inouï produit par le compositeur peut et doit être à son tour l’occasion, la matière même, de l’inouï qui advient dans l’écoute lorsque celle-ci est pratiquée. Et il n’est pas si rare que la musique contemporaine cherche à articuler explicitement ces deux inouïs ; elle doit alors affronter des contradictions internes – première audition contre réécoutes, musique interprétée contre musique enregistrée, etc. – aux effets en partie imprévisibles. Pour le montrer, nous nous référons en particulier à des textes de Stockhausen, Pousseur, Schoenberg, et à un manuel de 1931 destiné aux amateurs de disques. |