Résumé |
Alors que Claude Lévi-Strauss a construit les Mythologiques sur le modèle de "la musique", et que les compositeurs de musique srielle ou concrète ont fait référence au structuralisme, il s'est produit un grand malentendu entre l'anthropologie structurale et lamusique contemporaine dans les années 1960. L'article expose les raisons de ce malentendu, en proposant une hypothèse historique sur la constitution du structuralisme dans les champs de la musicologie et des sciences humaines en France. Il retrace d'abord les moments de formation de ce paradigme dans les deux domaines, en soulignant ses aspects collectifs et insitutionnels, ainsi que ses remises en causes internes et ses itinéraires individuels; c'est en effet au moment où Lévi-Strauss remet en question le structuralisme computationnel de ses premiers travaux en recourant à sa propre culture musicale qu'il critique la musique contemporaine pour son volontarisme collectiviste. L'article propose ensuite une lecture des textes de Lévi-Strauss consacrés à la musique, en vue d'éclairer les réactions des musiciens et musicologues qui les ont discutés : sont alors dégagées des pratiques de pensée et des pratiques d'écoute qui, formées dans d'autres champs intellectuels ou culturels que celui des musiciens contemporains, ne peuvent se rencontrer. Ce constat d'échec débouche cependant sur une hypothèse au sujet des pratiques musicales qui ont rendu possible le structuralisme, notamment à partir du modèle synoptique de la partition comme mise en visibilité de différences senties. |